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Le collectif du « Côtarin visible » renouvelle sa demande de réunion publique

« Les habitants des Côtes d’Arey ont reçu la réponse de la mairie à notre demande de réunion publique dans leur boîte aux lettres.

Nous tenons tout d’abord à préciser qu’avant de distribuer les tracts dans les boîtes aux lettres de la commune, nous avions envoyé un courrier recommandé avec accusé de réception à l’attention de M. le maire. Nous souhaitons dissiper tout malentendu quant au fait que nous n’aurions pas contacté la mairie au préalable. »

La réponse de la mairie (que nous avons reçue par courrier également, voici quelques jours) n’a pas manqué de nous surprendre à bien des égards. En tout premier lieu car nous n’avons pas obtenu de réponse claire concernant notre demande de réunion publique, M. le maire n’étant pas revenu sur ce sujet précis.

En guise de préambule, il est important de préciser que nous renouvelons donc notre demande de réunion publique au sujet du projet de vidéosurveillance aux Côtes d’Arey, demande dont vous pourrez trouver le texte sur la page de la pétition que vous pouvez signer si vous souhaitez soutenir notre demande1.

Certains détails dans la lettre de M. le Maire nous ont interpellés. Voici nos arguments et remarques, étayés par diverses publications consultables via les liens indiqués en fin du présent document.

1) Nous constatons que le « certain » collectif Côtarin visible semble déjà être mis en doute, et ce dès le titre de la missive.

2) Nous aimerions savoir comment M. le maire peut affirmer qu’une majorité des habitants des Côtes d’Arey sont favorables au dispositif prévu, étant donné qu’il n’y a eu aucune consultation ni réunion publique à ce sujet (ni à aucun autre sujet, d’ailleurs, contrairement aux annonces faites dans ce sens durant la campagne électorale et au début du mandat 2).

3) Nous notons que ce dispositif de vidéosurveillance serait devenu indispensable, mais nous ne savons pas en quoi, ni de quelle façon il serait supposé résoudre tous les problèmes dont serait affligé notre village. La littérature scientifique ne contient pas de publications qui démontreraient l’efficacité de caméras de surveillance pour empêcher la commission de dégradations ou de vols dans des espaces ouverts.

4) Nous ne comprenons pas pourquoi une opposition à un projet ne serait pas discutable, sauf si l’on omet de se placer sous l’angle de la démocratie, qui sous-tend la tenue de discussions sur tous les sujets possibles. De même, M. le maire dit être surpris que ce projet soit contesté. Pourtant, aucun élément tangible n’est avancé pour expliquer en quoi il serait incontestable ou indispensable.

Enfin, le procès-verbal du conseil municipal des Côtes d’Arey du 9 juin 2023 3 indique que plusieurs questions de fond ont été posées au sujet du dispositif de vidéosurveillance, ce qui contredit le caractère surprenant de la contestation d’une partie des habitants de la commune.

5) Outre la haute teneur en condescendance du passage sur la « nuance qui semble échapper à un petit nombre de nos concitoyens », nous nous interrogeons quant à cette absurdité sémantique.

Comment des caméras qui filment l’espace public « protégeraient » qui que ce soit d’une agression, tandis que des caméras qui filment l’espace privé ne feraient que surveiller ? Ces technologies seraient-elles si différentes ? Jusqu’à preuve du contraire, aucune caméra en train de filmer une agression ne s’est jamais transformée en bouclier pour protéger la victime de son agresseur 4.

Concernant, plus généralement, cette appellation trompeuse de « vidéoprotection », nous remarquons que la plupart des pays occidentaux (Allemagne, Pays-Bas, Espagne, Italie…) parlent bien de « vidéosurveillance ». Le vocable a été transformé durant le mandat présidentiel de M. Nicolas Sarkozy afin de présenter cette technologie de surveillance de masse de façon plus acceptable pour la population 5.

6) M. le maire feint de penser que parce que nous demandons une réunion publique sur un sujet qui nous paraît clivant et contre lequel nous nous opposons effectivement, nous validerions la délinquance au sein de la commune. Cette rhétorique fallacieuse (qui relève du sophisme) ne laisse pas de nous surprendre.

Quant au terme de « prolifération » (normalement employé pour qualifier une expansion non contrôlée de populations d’animaux nuisibles), il sous-entend que la délinquance serait actuellement plus forte qu’auparavant. Nous serions d’ailleurs très heureux de pouvoir disposer des statistiques officielles à ce sujet.

7) L’importance des délits commis est sujette à discussion (installer des caméras coûteuses pour éviter l’inscription de tags sur des murs ?). S’il est évident que de tels actes doivent être combattus, nous estimons que la réponse apportée peut l’être sous bien des manières différentes. M. le maire n’apporte qu’une solution de répression à l’aide d’outils technologiques dont rien n’indique qu’ils sont efficaces en la matière. Au contraire, de nombreuses publications scientifiques issues de divers pays à travers le monde 6 démontrent que les caméras de surveillance n’ont qu’un impact très limité sur la prévention des délits (vandalisme, trafic de stupéfiants, vols…). Dès lors, nous nous interrogeons sur les raisons qui poussent M. le maire à n’envisager aucune solution alternative.

8) Les services de la gendarmerie poussent effectivement à déployer des installations de vidéosurveillance, mais leur utilisation réelle des enregistrements des caméras est modeste 7.

L’obtention de l’autorisation de M. le préfet est à relativiser : deux autres communes de l’agglomération de Vienne Condrieu ont reçu une autorisation d’installation ou d’extension d’installation de vidéosurveillance lors de la même séance de travail à la préfecture de Grenoble 8. Nous nous permettons de douter que M. le préfet ait examiné en détail la situation de notre village, qui souffre d’une délinquance modeste au regard de la moyenne nationale.

9) M. le maire use de nouveau d’un argument fallacieux. Les aides et subventions de l’État et de la région ne sont pas « dédiées » à l’installation de caméras de surveillance. Il s’agit du Fond Interministériel de Prévention de la Délinquance (FIPD) qui recouvre plusieurs moyens possibles pour lutter contre la délinquance : « Les grandes priorités de ces politiques pour 2023 devront porter sur les actions visant à poursuivre le déploiement de la vidéoprotection de voie publique ; la prévention de la délinquance des jeunes, avec un accent porté sur ses manifestations les plus récentes ; la poursuite de la protection des victimes de violences intrafamiliales ; la prévention de la radicalisation, dans la perspective d’un nouveau plan national ; la lutte contre les séparatismes ; la lutte contre les dérives sectaires et contre le complotisme. » 9 L’on voit ici que la « vidéoprotection » n’est qu’une composante des actions envisagées par le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation pour combattre tous types de crimes et délits.

D’autre part, l’argent gaspillé pour un tel dispositif est entièrement public, qu’il vienne de la commune, de la Région, de l’État… c’est, in fine, toujours le contribuable qui paie, d’une manière ou d’une autre.
Par ailleurs, si les subventions existent bel et bien, elles ne s’appliquent que pour l’achat initial du système de vidéosurveillance. La maintenance, quant à elle, est payée exclusivement par la commune, et le budget consacré tendra probablement à augmenter avec le temps, d’autant plus si d’autres caméras sont installées par la suite. Le cercle vicieux n’est pas loin.
Enfin, le fait que les aides de l’État, de la Région et du Département soient en hausse ne démontrent qu’une seule chose : le fait que ces aides sont en hausse. Nous pensons que les décisions de financement, de quelque domaine que ce soit, se font hélas trop souvent sur la base de considérations politiques et non sur des bases scientifiques.

10) La notion d’intérêt général est floue. S’il est bien évident qu’assurer la tranquillité des habitants en fait partie, nous ne voyons pas en quoi permettre la surveillance généralisée de tous les habitants, dès lors qu’ils entrent dans l’espace public afin d’y effectuer leurs activités courantes (trajet vers l’école ou les commerces, promenades, etc), agirait dans l’intérêt général. Il nous semble en revanche que la rhétorique d’un tel projet de surveillance fait basculer le concept de présomption d’innocence, établi en droit depuis des siècles, vers celui de présomption de culpabilité : nous sommes tous filmés, au cas où. L’intérêt général est ici nettement minoré.

11) Nous nous permettons de suggérer à M. le maire de prendre contact avec son collègue d’Issy-les-Moulineaux, qui a pris le parti de miser exclusivement sur la prévention puisque cette commune ne dispose pas de caméras ni de police municipale, avec des résultats plutôt flatteurs 10.

12) M. le maire affirme qu’il répond systématiquement aux Côtarins lui soumettant diverses problématiques, et ce dans le respect des relations humaines. Or, nous trouvons que la réponse à notre missive est à la fois condescendante et agressive, alors que nous sommes nous-mêmes des habitants du village. Un tel dénigrement serait-il uniquement réservé aux habitants dont les opinions divergent avec celles de M. le maire ?

D’autre part, plusieurs habitants nous ont confié avoir sollicité la mairie sur divers sujets (environnement, problèmes d’écoulement des eaux de pluie, documents administratifs, entre autres) sans obtenir de réponse malgré leur insistance. Nous déplorons ce constat qui laisse aux habitants concernés un goût amer et un sentiment d’indifférence de la part de la mairie.

Enfin, nous avions souhaité que notre courrier initial pour demander une réunion publique soit transmis à l’ensemble du conseil. Malheureusement, notre requête est restée sans effet sans qu’aucune justification ne nous soit évoquée.

13) Les moyens de communication sont présents, mais nous ignorons comment ils pourraient permettre un échange entre les citoyens et les élus. La communication est en réalité à sens unique, étant avéré que l’exécutif ne souhaite pas organiser de réunion publique.

14) Là encore, il s’agit d’un moyen de communication unilatéral. En effet, il s’agit là aussi d’une présentation et non d’une concertation.

En conclusion, nous nous permettons de rappeler notre fort attachement au processus démocratique, qui, à nos yeux, ne se limite pas à déposer un bulletin dans une urne pour ensuite se désintéresser des affaires locales, régionales et nationales. Au contraire, nous pensons que ce processus se construit dans la durée, de façon bilatérale avec les autorités, en échangeant nos idées et nos avis dans le respect d’autrui, afin de prendre en considération les inévitables mais salutaires divergences d’opinions sur quelque sujet que ce soit.

Le collectif du Côtarin visible
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Notes :
1 Lien vers la pétition ou plus simplement https://www.change.org et effectuer une recherche sur « réunion publique Côtes d’Arey »

2 https://videosurveillance.vv221.fr/

3 Cfr. le procès-verbal du conseil municipal des Côtes d’Arey du 9 juin 2023, pages 3 à 6

4 Nous citons M. Alain Bauer, ancien professionnel de la vidéosurveillance, conseiller sécurité de M. Nicolas Sarkozy durant son mandat présidentiel, président de l’Observatoire de la délinquance, qui expliquait au micro de France Inter : « De très nombreuses études sur la vidéoprotection, essentiellement anglo-saxonnes, montrent que dans les espaces fermés et clairement identifiés c’est très efficace, mais que plus c’est ouvert et moins on sait à quoi servent les caméras, moins c’est efficace, pour une raison simple, c’est qu’elles descendent rarement des poteaux avec leurs petits bras musclés pour arrêter les voleurs : la caméra c’est un outil, c’est pas une solution en tant que tel… » LeMonde (https://www.lemonde.fr/blog/bugbrother/2011/07/14/la-cour-des-comptes-enterre-la-videosurveillance/)

5 Cfr. le manuscrit de thèse du Dr. Guillaume Gormand, chercheur en administration publique, pages 43 et suivantes

6 Cfr. (4) et (5) (pages 98 et suivantes), ainsi que :
-* le dernier rapport de la Cour des Comptes sur les polices municipales (pages 62 et suivantes) ;
-* la synthèse d’une étude réalisée pour le Centre de Recherche de l’École des Officiers de la Gendarmerie Nationale ;
-* etc.

7 Cfr. la gazette des communes en pages 8 et 9.

8 Cfr. le recueil des actes administratifs de la Préfecture de l’Isère, n°2023-173

9 Cfr. le site du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation

10 Cfr. Le Parisien (https://www.leparisien.fr/hauts-de-seine-92/ni-cameras-ni-police-municipale-le-contre-courant-opiniatre-d-issy-les-moulineaux-23-04-2019-8058810.php)

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